Quand vous lirez cet article, le site www.stibdemerde.be sera peut-être déjà retiré de la toile, mais il nous a semblé intéressant de relever l'existence de ce site défouloir pour plusieurs raisons.
Tout d'abord, précisons pour les non habitués de la Belgique que la STIB est l'équivalent bruxellois de la RATP, soit la régie qui gère l'ensemble des transports en commun (tram, bus et métro) sur le territoire de la capitale européenne. C'est un organisme d'état, un monopole non soumis à la concurrence et qui transporte bon an mal an plus de 285 millions de voyageurs par an.
Comme toute régie de transports publics du monde, la STIB génère son lot de partisans et de farouches opposants. Et comme partout ailleurs, les plus vindicatifs des utilisateurs mécontents ont compris depuis longtemps déjà que tous les forums et les réseaux sociaux du web offraient un espace d'expression rêvé pour proclamer à la face du monde tout le mal qu'ils pensaient des transports en commun.
L'apparition du site www.stibdemerde.be , qui a pour but avoué de « regrouper des anecdotes sur les mésaventures des Bruxellois empruntant les réseaux de la STIB (chose malheureusement très courante!) » (dixit), a donc été l'occasion pour certains de « se lâcher » plus que jamais.
Ce n'est pas la première fois que des usagers d'un service public ou d'un ancien monopole d'état se focalisent autour d'une initiative web pour faire entendre leur mécontentement ou leurs doléances. On citera à ce propos www.navetteurs.be qui fédère les usagers du rail belge, ou encore "Electrobel" et "Belgacon" qui s'attaquèrent en leur temps au monopole de la distribution de l'électricité pour le premier et à l'opérateur historique des télécoms belge pour le second. Ces deux sites ont disparu depuis, suite aux actions en justice intentées par les organismes incriminés.
Ce qui change avec « Stib De Merde », c'est que l'initiative vient d'une nouvelle agence de communication dont les responsables se revendiquent usagers de la STIB. Bien que "Stib de Merde" se présente comme « une façon sociale, ouverte et originale de recueillir tous les pépins rencontrés, liés à un service sensé être de bonne qualité (forcément y'a du boulot !) et de pousser un coup de gueule contre les abus et manquements de la STIB », les responsables du site reconnaissent qu'ils cherchent avant tout à provoquer un buzz et à faire parler de leur entreprise.
On peut légitimement s'interroger sur l'honnêteté de la démarche...
Parmi les réflexions que cette démarche provoque, il y a d'abord le fait que Ryanair continue de faire des émules. Malgré des dérapages récents comme l'affaire Rentabiliweb, on trouve toujours des candidats à la « Trash Communication ».
On peut également s'interroger sur le bien fondé de ce type d'action d'éclat. Honnêtement, si vous étiez le « Responsable Com » d'une grande entreprise souffrant d'une mauvaise réputation, vous feriez appel à une agence qui comme seul fait d'arme revendique d'avoir « dézingué » gratuitement une cible aussi facile qu'une régie des transports publics ?
La dernière réflexion nous amène à constater que la STIB paye ici son retard en matière de communication interactive et d'échanges « C2C ». Contrairement à la SNCF par exemple, la STIB n'a jamais mis en place de plateforme d'échange avec ses utilisateurs, pas plus qu'elle n'est présente de manière interactive sur les plateformes sociales, les sites de micro blogging ou les forums d'usagers.
Il y a bien eu la louable campagne « We Are The Stib » qui visait à humaniser l'organisme d'état mais qui pèse bien peu face à une campagne de dénigrement menée par une agence de communication et qui s'appuie, il faut bien le reconnaitre, sur un terreau quasi inépuisable de mécontents anonymes.
En guise de conclusion, nous dirions qu'étant donné la finalité mercantile de « Stib de Merde », nous ne pouvons pas donner tort à la STIB de vouloir donner une suite juridique à l'affaire. Si le site avait été une initiative citoyenne, notre position aurait bien sûr été tout autre. Mais que les responsables de la STIB ne se leurrent pas. Tôt ou tard, ils devront affronter de vrais usagers fédérés autour d'une plateforme digitale et qui sauront donner à leurs revendications légitimes un impact conséquent. Surtout, il ne faudra pas attendre ce moment-là pour mettre en place un plan d'engagement du dialogue, un monitoring de réputation ou une action de communication vis-à -vis des communautés en ligne.
Dernière Minute : A peine le temps d'écrire ce petit article que Stib de Merde avait déjà fermé définitivement ses portes. Manifestement les auteurs ont eu du mal à assumer les conséquences de leur action.